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Les trois villes: Rome

Chapter 7 No.7

Word Count: 13711    |    Released on: 06/12/2017

toujours, il fit de nouveau la rencontre de monsignor Nani. C'était un mercredi soir, et l'assesseur du Saint-Office venait d'

pensais à vous... Désirez-vous voir Sa Sainteté e

l'on sentait à peine l'ironie légère de l'homme sup

étonné par la brusquerie de l'offre. Toute distraction

savez-vous que le grand pèlerinage international du Denier de Saint-Pierre arrive vendredi à Rome et qu'il sera re?u samedi par Sa Sainteté. Le lendemain,

ille, orné d'un chiffre d'or, où il prit deux carte

Père. Je n'ai pas voulu trop insister pour leur obtenir une audience, elles ont d? se contenter, elles aussi, des cartes que je leur ai

, avec sa moquerie

r que cette longue attente est s?rement une grace que vous fait la Providence, en vous renseignant, en vous for?ant à comprendre des choses que vous autres, prêtres de France, vous ne sentez malheureusement pas, qua

in de femme, mais dont l'étreinte avait la force d'un é

corporations libres, tandis que lui, de la Choue, n'admettait le salut du catholicisme et du monde que par le système des corporations fermées, obligatoires. Aussi suppliait-il Pierre d'agir auprès des cardinaux favorables, et d'arriver quand même à être re?u par le Saint-Père, et de ne pas quitter Rome sans lui rapporter l'approbation auguste, qui seule devait décider de la victoire. La lettre donnait en outre d'intéressants détails sur le pèlerinage, trois mille pèlerins venus de tous les pays, que des évêques et des supérieurs de congrégations amenaient par petits groupes, de France, de Belgique, d'Espagne, d'Autriche, même d'Allemagne. C'était la France

llement élu, autrefois, bénissait le peuple, Rome et le monde. Elle est précédée de deux autres salles, la salle Royale et la salle Ducale. Et, lorsque Pierre voulut gagner la place à laquelle sa carte verte lui donnait droit, dans la salle même des Béatifications, il les trouva toutes les trois tellement bondées d'une foule compacte, qu'il s'ouvrit un chemi

le tr?ne vide. Ah! ce tr?ne, il les éblouissait, il les troublait jusqu'à la pamoison des ames dévotes, ainsi que l'ostensoir d'or où Dieu en personne allait daigner prendre place. Il y avait là des ouvriers endimanchés, aux regards clairs d'enfant, aux rudes figures d'extase, des dames bourgeoises vêtues de la toilette noire réglementaire, toutes pales d'une sorte de terreur sacrée dans l'excès de leur désir, des messieurs en habit et en cravate blanche, glorieux, soulevés par la conviction qu'ils sauvaient l'église et les peuples. Un groupe de ceux-ci se faisait remarquer particulièrement devant le tr?ne, tout un paquet d'habits noirs, les membres du comité international, à la tête duquel triomphait le baron de Fouras, un homme d'une cinquantaine d'années, très grand, très

qu'il s'avan?at; et, comme il répondait d'un geste modeste, signifiant qu'il préférait rester où il était, le prélat s'e

er votre place? Votre carte vous donne

t de monde à déranger, que je n'ai pas voul

s l'occupiez. Je désire que vous soyez au premier ran

ut le cardinal Sanguinetti, large et fort, qui causait très haut avec le baron de Fouras, le sang au visage. Un instant, monsignor Nani revint, de son air complaisant, pour lui montrer deux autres éminences, d'une importance de hauts et puissants personnages: le cardinal vicaire, un gros homme court, à la face enfiévrée, br?lée

détachement de gardes suisses en petit uniforme, conduit par un sergent; puis, les porteurs de chaise en rouge; puis, les prélats de la cour, parmi lesquels les quatre camériers secrets participants. Et, enfin, entre deux pelotons de gardes-nobles en demi-gala, le Saint-Père marchait seul, à pied, souriant d'un pale sourire, bénissant avec lenteur, à droite et à g

onde catholique devant la spoliation dont le Saint-Siège souffrait depuis un quart de siècle, la volonté de tous les peuples, représentés là par des pèlerins, de consoler le Chef suprême et vénéré de l'église, en lui apportant l'obole des riches et des pauvres, le denier des plus humbles, pour que la papauté véc?t fière, indépendante, dans le mépris de ses adversaires. Il parla aussi de la France, déplora ses erreurs, prophétisa son retour aux traditions saines, fit entendre orgueilleusement qu'elle était la plus opulente, la plus généreuse, celle dont l'or et les cadeaux coulaient à Rome, en un fleuve ininterrompu. Léon XIII, enfin, se leva, répondit à l'évêque et au baron. Sa voix était grosse, fortement nasale, une voix qui surprenait, au sortir d'un corps si mince. Et, en quelques phrases, il témoigna sa gratitude, dit combien son c?ur était ému de ce dévouement des nations à la papauté. Les

aires. Puis, c'était un redressement volontaire de toute la personne, une conscience de l'éternité qu'il représentait, une royale noblesse qui lui venait de n'être plus qu'un souffle, une ame pure, dans un corps d'ivoire, si transparent, qu'on y voyait cette ame déjà, comme délivrée des liens de la terre. Et Pierre, alors, sentit ce qu'un tel homme, le pontife souverain, le roi obéi de deux cent cinquante millions de sujets, devait être pour les dévotes et dolentes créatures qui venaient l'adorer de si loin, foudroyées à ses pieds par le resplendissement des puissances qu'il incarnait. Derrière lui, dans la pourpre des rideaux, quelle ouverture brusque sur l'au-delà, quel infini d'idéal et de gloire aveuglante! En un seul être, l'élu, l'Unique, le Surhumain, tant de siècles d'histoire, depuis l'ap?tre Pierre, tant de force,

nt dans la plus belle, la plus riche, une bannière de Lourdes, donnée sans doute par les pères de l'Immaculée-Conception. Sur la soie blanche, brodée d'or, d'un c?té la Vierge de Lourdes était peinte, tandis que, de l'autre, se trouvait le portrait de Léon XIII. Il le vit sourire à son image, il en eut un grand chagrin, comme si tout son

t rapproc

joie pour Sa Sainteté d'être si bien peinte

ait pas, devenu pale, il ajouta avec

à Rome, c'est si délicieux,

ndes qu'ils apportaient du monde catholique entier, la collecte universelle du denier de Saint-Pierre. C'était l'imp?t volontaire d'un peuple à son souverain, de l'argent, de l'or, des billets de banque, enfermés dans des bourses, dans des aum?nières, dans des portefeuilles. Et des dames vinrent ensuite qui tombaient à genoux, pour tendre les aum?nières de soie ou de velours, qu'elles avaient brodées. Et d'autres avaient fait mettre sur les portefeuilles le chiffre en diamants de Léon XIII. Et l'exaltation devint telle, un instant, que des femmes se dépouillèrent, jetèrent leurs porte-monnaie, jusqu'aux sous qu'elles avaient sur elles. Une, tr

u visible et le perdre, avant de gagner son salut, rien qu'en le touchant! La bousculade fut si terrible, que la plus extraordinaire confusion régna, balayant les gardes suisses. Et l'on vit des femmes se précipiter derrière le pape, se tra?ner à quatre pattes sur les dalles de marbre, y baiser ses traces, y boire la poussière de ses pas. La grande dame brune, tombée au bord de l'estrade, venait de s'y évanouir, en poussant un grand cri; et deux messieurs du co

ble, le c?ur soulevé, la raison révoltée. Et il retrou

-ce pas? dit le prélat. Cela

le idolatrie! ne put s'empê

pprochèrent pour le remercier; et Pierre eut la surprise de reconna?tre en elles les deux visiteuses des Catacombes, la mère et la fille, si belles, si gaies et si saines. D'

te, Pierre se sentit toucher à l'épaule, et il ape

irable d'expression! Un chef-d'?uvre des primitifs, un Cimabué, un Giotto, un Fra Angelico! Et les autres, celles qui mangeaient de baisers les bras du fa

s cesse, le besoin d'argent restait encore comme un boulet à son pied, qui le clouait à la terre. Puisqu'il ne pouvait accepter la subvention du royaume d'Italie, l'idée vraiment touchante du denier de Saint-Pierre aurait d? sauver le Saint-Siège de tout souci matériel, à la condition que ce denier f?t en réalité le sou du catholique, l'obole de chaque fidèle, prise sur le pain quotidien, envoyée directement à Rome, tombant de l'humble main qui la donne dans l'auguste main qui la re?oit; sans compter qu'un tel imp?t volontaire, payé par le troupeau à son pasteur, suffirait à l'entretien de l'église, si chaque tête des deux cent cinquante millions de chrétiens donnait simplement son sou par semaine. De la sorte, le pape devant à tous, à chacun de ses enfants, ne devrait rien à personne. C'était si peu, un sou, et si aisé, si attendrissant! Malheureusement, les choses ne se passaient point ainsi, le plus grand nombre des catholiques ne donnaient pas, des riches envoyaient de grosses sommes par passion politique, et surtout les dons se centralisaient entre les mains des évêques et de certaines congrégations, de manière que les véritables donateurs semblaient être ces évêques, ces p

nt-Pierre, dans la bousculade dernière des

ue les dons, aujourd'hui

ons, j'en suis convaincu

'immense place ensoleillée, où les trois mille pèlerins se répandaient, pe

l avait voulu suivre, au travers des murs, la marche de Léon XIII, regagnant par les galeries et par les salles son appartement, dont il apercevait là-haut les fenêtres. Il le voyait en pensée chargé des trois m

re, de ces millions?

empêcher de s'égayer, à cette curiosité formulée

teté est enfermée, toute seule. Elle a congédié le monde, elle a poussé soigneusement les verrous des portes... Et, si vous pouviez l'apercevoir, derrière cette fa?ade, vous la verriez compter et recompter son trésor avec

de grandes malles cadenassées. Il y avait bien, à gauche du couloir menant aux Archives, une grande pièce où se tenait le caissier général, avec un monumental coffre-fort à trois compartiments. Mais là était l'argent du patrimoine de Saint-Pierre, les recettes administratives faites à Rome; tandis que l'argent du denier, des aum?nes de la chrétienté entière, restait entre les mains de Léon XIII, qui seul en savait exactement le chiffre, et qui vivait

a, se tourna ver

eur? Ce sont là des fai

s approuver ni désapprouver, s'était remis à suivre sur

choses!... Je ne le sais pas, moi; mai

laisir de les compter et de les recompter sans cesse... Seulement, on peut bien admettre que le Saint-Père aime tout de même un peu l'argent pour lui-même, pour le plaisir de le toucher, de le ranger, quand il est seul, une manie bien exc

nstitutions, des associations de toutes sortes. Sans argent, elle n'était plus qu'une vassale, à la merci des pouvoirs civils, du royaume d'Italie et des autres nations catholiques. Et c'était ainsi que, tout en étant charitable, en soutenant largement les ?uvres utiles, qui aidaient au triomphe de la Foi, il avait le mépris des dépenses sans but, il se montrait d'une dureté hautaine pour lui-même et pour les autres. Personnellement, il était sans besoins. Dès le début de son pontificat, il avait nettement séparé son petit patrimoine privé du riche patrimoine

uelles sont les recettes et quelle

ata de répéter son

ignorance... Adressez-vous à monsieu

enu fixe des capitaux placés, il y a les quelques centaines de mille francs que produisent, bon an mal an, les droits de chancellerie de toutes sortes, les titres nobiliaires, les mille petits frais que l'on paye aux congrégations... Seulement, comme le budget des dépenses dépasse sept millions, vous voyez qu'il fallait en trouver six chaque année; et c'est s?rement le denier de Saint-Pierre qui les a fournis, pas le

utait, trè

ême quatre! Que rapporte-t-il

plus, il est devenu radicalement impossible de se faire même une idée de ce que le pape re?oit. Lui seul, je le dis encore, conna?t le chiffre total, garde l'argent et en dispose, en souverain ma?tre. Il est à croire que, les bonnes années, les dons ont produit de quatre à ci

dodelinait de la tête, de l'air d'un homme enchanté d'apprend

llez, mon

s a été l'argent prêté par lui aux princes qui spéculaient... Il n'y a réellement que la France et l'Angleterre où de riches particuliers, de grands seigneurs, ont fait au pape, prisonnier et martyr, de royales aum?nes. On cite un duc anglais qui, chaque année, apportait une offra

enses? dema

cèses italiens, un million pour la Secrétairerie et les nonces, un million pour le Vatican. J'entends, par ce dernier article, les dépenses de la cour pontificale, des gardes militaires, des Musées, de l'entretien du palais et de la basilique... Nous sommes à cinq millions, n'est-ce pas? Mettez les deux autres pour les ?uvres soutenues, pour la Pro

place s'était vidée de sa foule grouillante, il n'y avait plus que l'obélisque et les deux fontaines, dans le désert br?lant du pavé

ement d'or dont on lui parlait, baignant de toute sa personne blanche et pure, de tout son pauvre corps de cire

l est sans inquiétude,

me qu'il demande; elle la donnerait, si forte qu'elle f?t. Certainement, elle a eu la sagesse de faire de grandes économies, le trésor de Saint-Pierre est plus riche que jamais... Embarrassé, embarrassé, bonté divine! Mais savez-vous bien que, si, demain, dans des

dain, retrouvant

tement là pour vous renseigner... Ah! monsieur Habert, monsieur Habert! moi qui vous croyais tout envolé, évanoui dans l'art, bien loin des basses questions d

gélique, aux longs cheveux bouclés, aux yeux mauves qui se noyaient devant les Botticelli, un gaillard pratique, très rompu aux a

ut m'est rêverie, et

et vous aurez vu, vous aurez compris par vous-même, ce qui vaudra certainement mieux que toutes les explications du monde... A demain, ne manquez pas la grande cérémonie à Sa

, pour l'investir et le briser. Et un flot d'orgueil le rendit dédaigneux, dans la croyance où il était de sa force de résistance. De nouveau, il se jurait de ne jamais céder, de ne pas retirer son livre, quels que fussent les événements. Lorsqu'on s'entête dans une résolution, on est inexpugnable, qu'importent les découragements et les amertumes! Mais, avant de traverser la place, il leva encore les regards sur les fenêtres du Vatican; et tout se résumait, il ne restait que cet argent dont la lourde nécessité attachait à la terre, par de dernières entraves, le pape, aujourd'hui délivré des bas soucis du pouvoir te

alors en Italie, accourus à Rome, désireux de voir une de ces grandes solennités pontificales, si rares désormais; sans compter Rome elle-même, les partisans, les dévots que le Saint-Siège y comptait, ainsi que dans les autres grandes villes du royaume, et qui s'empressaient de manifester, dès que s'en présentait l'occasion. On prévoyait, par le nombre des cartes distribuées, une affluence de quarante mille assistants. Et, lorsque, à neuf heures, Pierre traversa la place, pour se rendre, rue Sainte-Marthe, à l

l'age. Mais il fut plus étonné encore, en apercevant la statue de bronze de Saint Pierre habillée elle aussi, revêtue, telle qu'un pape vivant, d'habits pontificaux somptueux, la tiare posée sur sa tête de métal. Jamais il n'avait songé qu'on p?t habiller les statues, pour leur gloire ou pour le plaisir des yeux, et le résultat lui en parut funeste. Le Saint-Père devait dire la messe à l'autel papal de la Confession, le ma?tre-autel, sous le d?me. A l'entrée du transept de gauche, sur une estrade, se trouvait le tr?ne

s étrangères, des Allemandes, des Anglaises, des Américaines surtout, ravissantes, d'une grace d'oiseaux étourdis et bavards. A sa gauche, dans la tribune de la noblesse romaine, il reconnut Benedetta et sa tante, donna Serafina; et, là, tranchant sur la simplicité réglementaire du costume, les grands voiles de dentelle luttaient d'élégance et de richesse. Puis, c'était, à sa droite, la tribune des chevaliers de Malte, où se trouvait le grand ma?tre de l'ordre, au milieu d'un groupe de commandeurs; tandis que, de l'autre c?té de la nef, en face de lui, dans la tribune diplomatique, il apercevait les ambassadeurs de toutes les nations catholiques, en grand costume, étincelants de broderies. Mais il revenait quand même à la foule, la grande foule vague et houleuse, où les trois mille pèlerins semblaient comme perdus, noyé

les admira pourtant, on leur fit une ovation, un murmure flatteur les accompagna, pour leur belle tenue, d'une impassibilité, d'une raideur militaire exagérée. Une Américaine les déclara des hommes superbes. Une Romaine donna à une amie, une Anglaise, des détails sur ce corps d'élite, disant qu'autrefois les jeunes gens de l'aristocratie tenaient à honneur d'en faire partie, pour la richesse de l'uniforme et la joie de caracoler devant les dames, tand

son effet, au milieu du magnifique décor où elle allait se produire. Le cortège venait de se former dans la coulisse, au fond de la chapelle de la Pieta, la première en entrant, à droite; et, pour s'y rendre, le Saint-Père, qui était arrivé de ses appartements voisins par la chapelle du Saint-Sacrement, avait d? se dissimuler, passer derrière la draperie de la nef latérale, utilisée de la sorte comme toile de fond. Les cardinaux, les archevêques, les évêques,

largement espacés, solennellement. Enfin, autour de Sa Sainteté, se groupaient les officiers de sa maison militaire, les prélats de l'antichambre secrète, monseigneur le majordome, monseigneur le ma?tre de chambre, et tous les hauts dignitaires du Vatican, et le prince romain assistant au tr?ne, le traditionnel et symbolique défenseur de l'église. Sur la chaise gestatoire, que les flabelli abritaient des hautes plumes triomphales et que

t il gardait une immobilité hiératique et hautaine, tel qu'une idole desséchée, dorée depuis des siècles, parmi la fumée des sacrifices. Les yeux seuls vivaient, au milieu de la rigidité morte du visage, des yeux de diamant noir et étincelant, fixés au loin, hors de la terre, à l'infini. Il n'eut pas un regard pour la foule, il n'abaissa les yeux ni à droite ni à gauche, resté en plein ciel, ignorant ce qui se passait à ses pieds. Et cette idole ainsi promenée, comme embaumée, sourde et aveugle, malgré l'éclat de ses yeux, au milieu de cette fo

l'appel des clairons, les anges eux-mêmes eussent répondu. Les voix descendaient, volaient sous les vo?tes, d'une légèreté de harpes célestes; puis, elles s'évanouirent en un accord suave, elles remontèrent aux cieux avec un petit bruit d'ailes qui se perdit. Après la messe, Sa Sainteté, encore debout à l'autel, entonna elle-même le Te Deum, que les chantres de la chapelle Sixtine et les ch?urs reprirent, chaque partie chantant un verset, alternativement. Mais bient?t l'assistance entière se joignit à eux, les quarante mille voix s'élevèrent, le chant d'allégresse et de gloire s'épandit dans l'immense vaisseau avec un éclat incomparable. Alors, le spectacle fut vraiment d'une extraordinaire magnificence, cet autel surmonté du baldaquin fleuri, triomphal et doré du Bernin, entouré de la cour pontificale que les cierges allumés constellaient d'étoiles, ce Souverain Pontife au centre, rayonnant comme un astre dans sa chasuble d'or, devant le

a bénédiction papale, d'une voix haute et forte, qui semblait être en lui la voix de Dieu même, tellement elle surprenait, au sortir de ces lèvres de cire, de ce corps exsangue et sans vie. Et l'effet fut foudroyant, des applaudissements de nouveau éclatèrent, dès que le cortège se reforma pour s'en aller par où il était venu, une frénésie d'enthousiasme arrivée à un tel paroxysme, que, les battements de mains ne suffisant plus, des acclamations s'y mêlèrent, des cris qui gagnèrent peu à peu toute la foule. Cela commen?a près de la statue de Saint Pierre, dans un groupe ardent: ?Evviva il papa re! Evviva il papa re! Vive le pape roi! Vive le pape r

il longea un moment la nef latérale de gauche, dans la bousculade, dans l'assourdissante clameur de la foule qui continuait; et, désespérant de gagner la rue, voulant éviter la cohue de la sortie, il eut l'inspiration de profiter d'une porte ouverte, il se réfugia dans le vestibule d'où montait l'escalier conduisant sur le d?me. Un sacristain, debout à cette po

nt la fa?ade est surmontée, au-dessus de la place Saint-Pierre, des géants de six mètres, sans cesse en réparation, dont les bras, les jambes, les têtes, à demi mangés par le grand air, ne tiennent plus qu'à l'aide de ciment, de barres et de crampons; et, comme il se penchait pour jeter un coup d'?il sur l'entassement roux des toits du Vatican, il lui sembla que le cri qu'il fuyait s'élevait de la place. En hate, il reprit son ascension, dans le pilier qui menait à la coupole. Ce fut un escalier d'abord, puis des couloirs étranglés et obliques, des rampes coupées de quelques marches, entre les deux parois de la coupole double, l'intérieure et l'extérieure. Une première fois, curieusement, il poussa une porte, il rentra dans la basilique, à plus de soixante mètres du sol, sur une étroite galerie qui faisait le tour du d?me, juste au-dessus de la frise, où se lisait l'inscription: Tu es Petrus et super hanc petram..., en lettres de

ù le pape passait les chaudes journées d'été, ne faisaient que de petites taches blanches, au milieu de ces terrains irréguliers, enclos bourgeoisement par le terrible mur de Léon IV, qui gardait son aspect de vieille forteresse. Puis, il tourna autour de la lanterne, le long de l'étroite galerie, et il se trouva brusquement devant Rome, une immensité déroulée d'un coup, la mer lointaine à l'ouest, les cha?nes ininterrompues des montagnes à l'est et au midi, la Campagne romaine tenant tout l'horizon, pareille à un désert uniforme et verdatre, et la Ville, la Ville éternelle à ses pieds. Jamais il n'avait eu une sensation si majestueuse de l'étendue. Rome était là, ramassée sous le regard, à vol d'oiseau, avec la netteté d'un plan géographique en relief. Un tel passé, une telle histoire, tant de grandeur, et une Rome si rapetissée par la d

s tachaient seuls de vert sombre. De la ville antique, on voyait la tour roussie du Capitole, les cyprès noirs du Palatin, les ruines du palais de Septime-Sévère, pareilles à des os blanchis, à une carcasse de monstre fossile, apportée là par les déluges. En face, la ville moderne tr?nait avec les longs batiments du Quirinal, remis à neuf, enduit d'un badigeon dont la crudité jaune éclatait, extraordinaire, parmi les cimes vigoureuses du jardin; et, au delà, sur les hauteurs du Viminal, à droite, à gauche, les nouveaux quartiers étaient d'une blancheur de platre, une ville de craie, rayée par les mille petites raies d'encre des fenêtres. Puis, ?à et là, au hasard, c'étaient la mare stagnante du Pincio, la villa Médicis dressant son double campanile, le

Ils avaient beau habiter le Vatican, ils venaient des maisons impériales du Palatin, du palais de Septime-Sévère, et leur politique, à travers tant de siècles, n'avait jamais poursuivi que le rêve de la domination romaine, tous les peuples vaincus, soumis, obéissant à Rome. En dehors de cette royauté universelle, de la possession totale des corps et des ames, le catholicisme perdait sa raison d'être, car l'église ne peut reconna?tre l'existence d'un empire ou d'un royaume que politiquement, l'empereur ou le roi étant de simples délégués temporaires, chargés d'administrer les peuples, en attendant de les lui rendre. Toutes les nations, l'humanité avec la terre entière, sont à l'église, qui les tient de Dieu. Si elle n'en a pas aujourd'hui la réelle possession, c'est qu'elle cède devant la force, obligée d'accepter les faits accomplis, mais sous la réserve formelle qu

encore garde Rome capitale, et pendant un siècle les papes qui se succéderont, ne cesseront de protester violemment, en réclamant leur royaume. Et, si une entente pouvait intervenir un jour, elle serait s?rement basée sur le don d'un lambeau de territoire. N'avait-on pas dit, lorsque des bruits de réconciliation couraient, que le pape régnant mettait, comme condition formelle, la possession au moins de la cité Léonine, avec la neutralisation d'une route allant à la mer? Rien du tout n'est point assez, on ne peut partir de rien pour arriver à tout avoir. Tandis que la cité Léonine, ce coin de ville si étroit, c'est déjà un peu de terre royale; et il n'y a plus qu'à reconquérir le reste, Rome, puis l'Italie, puis les nations voisines, puis le monde. Jamais l'église

ns maison militaire et sans honneurs royaux, pur esprit, pure autorité morale, enfermé au fond du temple, ne gouvernant le monde que de son geste de bénédiction, par la bonté et l'amour! Ce n'était là qu'une invention gothique, embrumée de brouillards, pour ce clergé latin, prêtres de la lumière et de la magnificence, pieux certes, superstitieux même, mais laissant Dieu bien abrité dans le tabernacle, afin de gouverner en son nom, au mieux des intérêts du ciel, rusant dès lors en simples politiques, vivant d'expédients au milieu de la bataille des appétits humains, marchant d'un pas discret de diplomates à la victoire terrestre et définitive du Christ, qui devait tr?ner un jour sur les peuples, en la personne du pap

l que le roi des temples, et qui tentait aujourd'hui de lui rendre un souffle puissant de vie, à l'heure où la mort commen?ait pour ses nefs trop vastes et désertées? La foule sortait toujours, la place en était pleine, et une affreuse tristesse lui serra le c?ur, car elle venait de balayer, avec son cri, le dernier espoir. La veille encore, après la réception du pèlerinage, dans la salle des Béatifications, il avait pu s'illusionner, en oubliant la nécessité de l'argent qui cloue le pape à la terre, pour ne voir que le vieillard débile, tout ame, resplendissant comme le symbole de l'autorité morale. Mais c'en était fait à présent de sa foi en ce pasteur de l'évangile, dégagé des biens terrestres, roi du seul royaume des cieux. L'argent du denier de Saint-Pierre n'imposait pas seul un dur servage

due ensoleillée, vaste à y loger une ville. Le prélat accompagnait les deux dames fran?aises, la mère et la fille, si heureuses, si

tes-vous content? Avez-vou

l'ame, il constatait où en était l'expérience

me un gar?on raisonnable. Je commence à croire que

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