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Au sortir de chez la fleuriste où elle avait prétexté d'aller faire une commande, Mme Lahonce se courba vers son fils, un petit gar?on d'une dizaine d'années, dr?lement vêtu d'un authentique costume de marin, à pantalon tromblon, à grand col de toile bleu ciel, et, la voix caline, elle murmura:
-Veux-tu que nous marchions un peu avant de rentrer, mon chéri? Dis, Charlie, veux-tu?
L'enfant, qui s'absorbait à mordiller le bout de ses gants blancs, répondit d'un ton machinal:
-Oui, maman!
Alors Mme Lahonce le saisit par la main, et tournant, à droite, l'angle de l'avenue d'Antin, elle s'achemina, d'un pas pressé, le long de l'avenue des Champs-Elysées, presque déserte, par ce dimanche grisatre et pluvieux d'octobre, à cette heure tardive de midi proche.
Elle marchait vite, vite, la tête baissée, afin d'éviter, sans doute, les rudesses de la bourrasque qui lui écrasait contre le front ses légers frisons blond pale, lui collait au corps sa jupe de drap bleu sombre; et Charlie, pour la suivre, était obligé de trotter, de s'appuyer à sa main qui le faisait sauter, rebondir comme une balle, comme enlevé puis laché par un souple élastique.
Il s'amusait même beaucoup, s'excitait à ce jeu, souriant à Mme Lahonce, souriant aux passants, pour les prendre ingénument à témoin de son agilité, de sa grace aisée; si bien que tous, au passage, fixaient la jeune femme et l'enfant, se retournaient pour les contempler encore.
Seulement ce regard variait selon les personnes. Chez les bourgeois, chez les braves gens dénués de malice, c'était une admiration instinctive, attendrie, pour le joli groupe que formaient Mme Lahonce et son fils, avec leurs visages fins à cheveux blond pale, leurs discrets et pareils costumes sombres que rehaussait le clair des gants blancs.
Et chez les autres au contraire, chez les mondaines informées ou les experts clubmen qui descendaient l'avenue, le parapluie sous le bras, la figure importante et soigneusement rasée, l'expression était toute différente. Il y avait dans leurs yeux méchants un reflet immédiat d'évaluation, un air d'impertinence connaisseuse, un air gouailleur de n'être pas dupe, de bien savoir, à peu près, ce qu'elle valait, ce qu'elle représentait de vertu, où elle courait peut-être si prestement, cette touchante jeune mère parfumée et son gentil matelot de sauvegarde.
Mais de toutes ces sympathies, de toutes ces curiosités envieuses, Mme Lahonce ne semblait rien voir. Elle continuait hativement son chemin, le front toujours baissé, toujours tendu, comme un front de bête, vers un but invisible et charmeur.
Les femmes, elle ne les examinait ni de près ni de loin. Les hommes, à distance, elle les inspectait d'un coup d'?il froid et net. Puis, assurée qu'ils n'étaient pas celui qu'elle guettait, celui qui devait venir de là-haut, de l'extrémité embrumée de la large avenue, elle rebaissait le regard, laissait dédaigneusement ces messieurs passer à c?té d'elle, comme des ombres indistinctes et médiocres, sans sexe, sans visage, sans intérêt. Et pour s'étourdir, se distraire de l'étouffante angoisse d'attente qui lui gonflait le c?ur, elle comptait ses pas, additionnait les numéros des maisons, posait à Charlie cent questions désordonnées sur ses camarades du lycée, sur son travail du lendemain, quand, tout à coup, ses traits se détendirent en un rayonnement de satisfaction et elle s'écria:
-Regarde, Charlie!... Regarde donc qui arrive là!
Elle désignait de la tête un jeune homme à moustache brun roux, à tournure élégante de clubman ou d'officier, qui s'avan?ait, tout souriant à leur rencontre.
-Favierres! s'exclama Charlie.
-Oui, ton ami Fav! Je te permets d'aller au-devant de lui... Va, mon chéri!...
Charlie s'élan?a en courant et stoppa droit devant le jeune homme, le béret à la main, les joues offertes pour un baiser, dans une posture correcte de petit gar?on bien élevé. Favierres l'embrassait, lui tapotait affectueusement la nuque:
-Comment ?a va, mon vieux Charlie?... Comment ?a va?
Il se redressa pour saluer Mme Lahonce, et retenant longuement la main qu'elle lui tendait:
-Bonjour, Madame!... Dehors si tard? Vous rentrez chez vous, je suppose?
Mme Lahonce retira sa main et d'une voix un peu altérée d'émotion:
-Mais oui, nous rentrons... Nous rentrons par le plus long... Et Mme Favierres se porte bien?
Favierres riposta:
-Très bien... Très bien, je vous remercie...
Ils restaient, face à face, les yeux dans les yeux, tout heureux de se retrouver, tout au soulagement d'être s?rs enfin qu'ils se verraient ce matin-là.
Puis Favierres reprit d'un ton de prière et de commandement aussi:
-Vous rentrez par l'avenue Hoche, n'est-ce pas, Madame?... Voulez-vous me permettre de vous accompagner?
-Mais bien volontiers!
Et ces préliminaires accomplis, selon le cérémonial usité par eux au dehors, dans leurs rencontres matinales, ils se remirent lentement en route, marchant c?te à c?te, la tête de profil, souriante, avec cet air joyeux, ces regards avides l'un de l'autre qui distinguent des époux repus les couples d'amoureux furtifs.
Charlie pourtant, par sa présence, pouvait donner le change, ajouter comme un aspect conjugal à cette promenade clandestine. Il s'accrochait à Mme Lahonce, ne la lachait pas, la devan?ant même, se jetant contre elle, par instants, comme un gros chien turbulent, pour happer la conversation, entendre ce que racontait son grand ami Vincent Favierres.
Mais ils parlaient à mi-voix de choses mystérieuses, inintelligibles, d'un certain ?on?, entre autres, dont les paroles, les volontés, les actions semblaient celles d'une personnalité toute-puissante, que Charlie, lui, ne connaissait nullement. Ils se disaient avec volubilité, et dans ce langage symbolique et obscur que se créent, à la longue, les amants, tout ce qui s'était passé chez eux ou ailleurs durant ce siècle de vingt heures écoulé depuis leur rendez-vous de la veille, les petites remarques amusantes ou bizarres qu'ils avaient chacun faites, tout ce qui leur avait paru, dans l'intervalle, propre à gêner ou à servir leurs amours difficiles.