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Les quatre cavaliers de l'apocalypse

Chapter 3 LE COUSIN DE BERLIN

Word Count: 6740    |    Released on: 06/12/2017

ranger au milieu de ses lectures, et il pouvait absorber en paix une quantité d'ouvrages écrits sur les sujets les plus disparates. Il lui resta même assez de temps pour lier connaissance avec

ilés dans les coins, d'autres éparpillés sur le plancher, d'autres amoncelés sur des chaises boiteuses, sur de vieilles tables et même sur un lit que l'on ne refaisait pas tous les jours. Mais il éprouva une sorte de désillusion, lorsqu'il apprit qu'en somme il n'y avait rien d'étrange et d'occulte dans l'existence de son nouvel ami. Ce que Tchernoff écrivait près de la fenêtre, c'était tout simplement des traductions exécutées, soit sur commande et moyennant finances, soit gratuitement pour des journaux socialistes. La seule chose étonnante, c'était le nombre des langues que Tchernoff possédait. Comme les hommes de sa race, il avait une merveilleuse facilité à s'approprier les vivantes et les mortes, et cela expliquait l'incroyable diversité des idiomes dan

sation. Mais Argensola trouva le moyen d'apprivoiser ce sauvage: il l'amena dans l'atelier de Jules, où les bons vins et les fines liqueurs eurent vite fait de rendre le Russe plus communicatif. Argensola apprit al

s'offensait pas de joindre encore à ces fonctions celles de valet de chambre, accourut pour introduire le visiteur chez le ?peintre d'ames?. Ce visiteur parlait correctement le fran?ais, mais avec un fort ac

aient beau être liés par une étroite parenté, ils ne se connaissaient guère, mais assez cep

mpat sur la condition sociale de l'intro

n moins remarquable par ses vastes lectur

ndit imperturbablement le docteur, avec la suf

nsola faisait mi

upérieur qui veut montrer de la condescendance à un inférieur et d'un conférencier qui, infatu

taille, avait de longues et larges basques et des revers très montants, ce qui lui donnait une vague ressemblance avec une tunique militaire. Ses moustaches roussatres, plantées sur une forte machoire, et ses cheveux coupés en brosse complétaient la martiale similitude. Mais ses yeux,-des yeux d'homme d'étude, grands, myopes et un peu troubles,-s'abritaient derrière des lunettes aux verres épais et donnaient malgré tout à leur propriétaire l'apparence d'un homme pacifique. Cet Hartrott, a

ge, alors surtout que de telles études ne tendaient qu'à confirmer les Allemands dans leurs préjugés et dans leur outrecuidance. En somme, que fallait-il pour écrire sur un minime fait historique un livre énorme et illisible? La patience de végéter dans les bibliothèques, de classer des milliers de fiches et de les recopier plus ou moins confusément. Dans l'opi

vait beaucoup regretté l'absence de Jules et il aurait été très faché de repartir sans l'avoir vu. Mais, hier soir, sa mère Héléna lui avait appris qu

à la guerre? lu

ès-demain. Elle est inévitable. C'est une c

ement cette belliqueuse et paradoxale proposition, et ils comprirent au

n?ais, puisque tu es né en Argentine. On

ua Jules en riant

tation, comme si son cousin lui avait adre

endroit que naisse un Allemand, i

urnant vers

, votre patrie, doit aux Germains ses qualités les meilleures. C'est de nous que lui sont venus le culte de l'hon

ement, et Hartrott, flatté d'un silence qui l

stimer heureux d'être nés à l'époque présente, la plus intéressante de toute l'histoire

e, le plus redoutable de ses adversaires. Ensuite elle se retournerait contre la Russie qui, lente dans ses mouvements, ne serait pas capable d'opposer à cette offensive une défense immédiate. Enfin elle attaquerait l'orgueilleuse Angleterre, l'isolerait dan

ud de l'Europe, n'étaient que des Celtes brachycéphales, représentants abatardis d'une race inférieure. Les Celtes, incorrigibles individualistes, n'avaient jamais été que d'ingouvernables révolutionnaires, épris d'un égalitarisme et d'un humanitarisme qui avaient beaucoup retardé la marche de la civilisation. Au contraire les Germains, dont l'ame est autoritaire, mettaient au-dessus de tout l'ordre et la force. élus par la nature pour commander aux autres peuples, ils possédaient toutes les vertus qui distinguent les chefs-nés. La Révolution fran?aise n'avait été qu'un conflit entre les Celtes et

s'il est foncièrement germanique. Nous sommes l'aristocratie d

histoire, gardait le silence, et qu'Argensola continuait de sourire

science germanique, la première de toutes, est unie pour jamais à ce que les révolutionnaires latins appellent dédaigneusement le militarisme. La force, reine du monde, est ce qui crée le droit, et c'est elle qui impos

in que l'établissement d'une hégémonie continentale. Aujourd'hui c'était le tour de Guillaume II, le grand homme complexe dont la patrie avait besoin. Ainsi que l'avait dit Lamprecht, ma?tre de Julius von Hartrott, l'empereur représentait à la fois la tradition et l'avenir, la méthode et l'audace; comme son a?eul, il était convaincu qu'il régnait par la grace de Dieu; mais son intelligence vive et brillante n'en reconnaissait et n'en acceptait pas moins les nouveautés modernes; s'il était romantique et féoda

Il existe, n'en doutez pas, un Dieu chrétien germanique qui est notre Grand A

re ouvertement sarcastique. Mais le docteur était tro

ntre enfin en possession de toutes les contrées où il y a

minés et peuplés par des conquérants de race teutonne. Mais le docteur ne s'en tenait point là. Comme la plupart des nations de l'Amérique étaient d'origine espagnole ou portugaise, le docteur les comprenait dans ses revendications. Quant à l'Amérique du No

e nous avons peu d'amis. Comme nous sommes les plus intelligents, les plus actifs, les plus capables d'imposer aux autres notre culture, tous les peuples nous considèrent avec une hostilité envieuse. Mais

'ailleurs, l'ex-professeur de tango était mal préparé à soutenir une discussion sur de tels sujets avec le savant professeur tudesque

déjà déclarée? En ce moment, des négociations diplomatique

n geste d'impati

i quitté l'Allemagne, il y a huit jours,

allemand fait-il semblant de s'entremettre dans le conflit qui a éclaté entre l'Aut

es puissent être. Au surplus, nous avons chez nous beaucoup de gens qui vivent à leur aise et qui ne désirent pas la guerre; il convient donc de leur faire croire que ce sont nos ennemis qui nous l'imposent, pour que ces gens sentent la néc

Le glorieux Bismarck, afin d'obtenir la guerre qu'il voulait contre la France, n'avait pas hésité à altérer un télégramme, et Hans Delbruck avait eu raison d'écrire à ce sujet: ?Bénie soit la main qui a falsifié la dépêche d'Ems!? En ce qui concernait la guerre prochaine, il était urgent qu'elle se f?t sans retard: aucun des ennemis de l'Allemagne n'était prêt, de sorte que les Allemands qui, eux,

us voulons étendre notre activité sur toute la planète. La vieille Rome, mortellement malade, appela barbares les Germains qui ouvrirent sa fosse. Le monde d'aujourd'hui a, lui aussi, une odeur de mort, et il ne manquera pas non plus de nous appeler barbares

aux hommes de terribles surprises. Il suscite des forces occultes avec lesquel

ffaibli physiquement, infecté de l'esprit révolutionnaire, désaccoutumé de l'usage des armes par l'amour excessif du bien-être. Ensuite il y avait la Russie; mais les masses amorphes de son immense population étaient longues à réunir, difficiles à mouvoir, travaillées par l'anarchisme

émonie continentale qui leur a été octroyée par le Congrès de Vienne, après la chute de Napoléon. Que vaut l'effort qu'ils tenteront de faire? Leur petite armée n'est composée que du rebut de la nation, et elle est totalement dépourvue d'esprit guerrier. Lor

bsorber dans ses réflexions, dont il tradu

mes qui ont la prétention de résister à nos armées, copient nos méthodes dans leurs écoles et admirent nos théories, y compris celles qui n'ont obtenu en Allemagne qu'un médiocre succès. Souvent nous rions e

ailleurs aucun commentaire. Hartrott, qui avait surpris ce geste, lui att

pas rapide à une catastrophe? Eh bien, des peuples qui se jugent ainsi ont assurément la mort dans les entrailles. En outre, les faits confirment chaque jour l'opinion qu'ils ont de leur propre décadence. Il est impossible de douter qu'une révolution éclate à Paris aussit?t après la déclaration de guerre. Tu n'étais pas ici, toi, pour voir l'agitation des boulevards à l'occasion du procès Caillaux. Mais, moi, j'ai constaté de mes yeux comment réactionnaires et révolutionnaires se mena?ai

rre amusa Jules

e l'Allemagne est

ssante. Nous avons les libertés qui conviennent à un grand

liberté p

ue. Les Allemands n'en éprouvent pas le besoin. Nés pour être les ma?tres, ils reconnaissent la nécessité des hiérarchies et consentent à être

elle sorte que l'homme y donnat à la société le maximum de rendement; tous les individus seraient enrégimentés pour toutes les fonctions sociales, obéiraient comme

montre et changea brusquem

e te porte ne m'avait fait un devoir de te donner un bon conseil. Puisque tu es étranger et que rien ne t'oblige à rester en France, viens chez nous à Berlin. La guerre se

as à un danger prochain, et d'ailleurs il n'était

ompréhensible, c'est que ma mère elle-même hésitait à repartir avec moi pour Berlin. Grace à Dieu, j'ai fini par la convaincre et peut-être, à cette heure, est-elle déjà en route. Il a été convenu entre elle et moi que, si elle était prête à temps, elle prendrait le train de l'après-midi, pour voyager en compagnie d'une de ses amies, femme d'un

le semblait contrarie

a terreur est l'unique moyen de réussir vite, parce qu'elle trouble l'intelligence de l'ennemi, paralyse son action, brise sa résistance. Plus la guerre sera dure, plus elle sera courte. L'Allemagne va donc être cruelle, très cruelle pour empêcher que la lutte se prolonge. Et il ne faudra pas

urais honte de moi-même. Fuir devant un

e dois aller encore à notre ambassade, où l'on me remettra des documents co

son chapeau. Puis, sur le seui

s de revenir à Paris, lorsque le drapeau allemand flottera sur la Tour Eiffel. Cinq ou six semaines suffiront pour cela. Donc, au revoir jusqu'en septembre. Et crois bien qu'après le triomphe germanique Paris n'en sera pas moins agréable. Si la France dispara?t en tant que grande puissance, les Fran?ais, eux, resteront, et ils auront

rmée, Argensola éclata

céphale de cousin! Mais pourquoi n'as

de la sociologie n'est pas précisément mon affaire. Si tu m'avais analysé un plus grand nombre de bouquin

nstruction moyenne qui croie à ces antiquailles? Comment existerait-il un peuple de race pure, puisqu'il n'est point d'homme au monde dont le sang n'ait subi une infinité de mélanges dans le cours des siècles? Si les Germains se sont mis de te

es peuples forts n'ont-ils pas e

nde connu, apportaient aux régions conquises le droit et les formes de la justice. Les Fran?ais de la Révolution et de l'Empire justifiaient leur ardeur conquérante par le désir de procurer la liberté à leurs semblables et de semer dans l'univers les idées nouvelles. Il n'est pas jusqu'aux Espagnols du XVIe siècle qui, en bataillant contre la moitié de l'Europe pour exterminer l'hérésie et pour créer l'unité religieuse, n'aient travaillé à réaliser un idéal qui peut-être était nébuleux et faux, ma

eure mon cousin Otto, lorsqu'il disait que les ennemis mêmes

?né sans le moindre discernement tout ce qui venait d'outre-Rhin, le bon et le mauvais, l'or et le talc; et la vanité germanique a été confirmée dans ses prétentions absurdes par la superstitieuse complaisance avec laquelle ses rivaux lui donnaient raison. Voilà pourquoi un pays qui a compté tant de philosophes et de penseurs, tant de génies contempl

e avec leur science appliquée ils concurrencent et menacent de supplant

analysé le Zarathustra, c'est ?l'unité de style dans toutes les manifestations de la vie?. Si donc un savant s'est cantonné dans ses études spéciales avec la seule intention d'en tirer des avantages matériels, ce savant peut très bien avoir fait d'importantes découvertes, il n'en

tragiques, je sens malgré moi que j'aime la France. Je n'ai jamais pris part aux luttes des partis; mais, d'instinct, je suis républicain. Dans mon for intérieur, je serais humilié du tr

e l'ordre à Paris, de la résolution, de l'enthousiasme. J'imagine que, dans les jours qui ont précédé Valmy, la situation était pire que celle d'à présent: tout était désorganisé; on n'avait pour se défendre que

rojetées sur l'écran d'un cinématographe, se succédaient des scènes d'amour, de batailles furieuses

à la gare; mais cela ne lui avait donné aucune inquiétude, et il était convaincu qu'Héléna, partie avec son amie la conseillère d'ambassade, arriverait à Berlin avan

é de ne partir que par le train du soir, avec son fils. Mais, le soir, elle avait une telle montagne de bagages,-malles, valises, caisses, cartons à chapeaux, sacs de nuit, paquets de toute sorte,-que jamais il n'avait été possible de préparer et de charger tout cela en temps opportun. Lorsqu'il avait été bien constaté que le train du soir n'était pas moins irrémédiablement perdu que celui de l'après-midi, elle s'était résignée sans trop de peine à rester. En somme, elle n'était pas fachée des fatalités imprévues qui l'excusaient d'avoir manqué à sa parole

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