La comtesse de Rudolstadt
ma mère, je crois bien qu'elle était, à l'égard de ses parents, dans la même incertitude que moi. On l'appelait à Venise, la Zingara, et moi la Zingarella. Ma mère m'avait donné pour patronne Mari
, et nommé Albert, me combla de soins et d'amitiés, et donna une guitare à ma mère. Ce chateau, c'était le chateau des géants, dont je
squ'à mon galetas, donna quelques secours à ma mère, et lui promit de me faire entrer à la scuola dei mendicanti, une de ces écoles gratuites de musique qui abondent en Italie, et d'où sortent tous les artistes éminents de l'un et l'autre sexe; car ce sont les meilleurs ma?tres qui en ont la direction. J'
, vivant, comme moi, sur le pavé. Notre amitié, ou notre amour, car c'était la même chose, était un sentiment chaste et délicieux. Nous passions ensemble, dans un vagabondage innocent, les heures qui n'étaient pas consacrées à l'étude.
ant, et qui lui était infidèle. Ce Zustiniani était précisément le protecteur de mon fiancé Anzoleto. Anzoleto fut engagé avec moi pour chanter les premiers r?les d'homme. Nos débuts s'annoncèrent sous les plus brillants auspices. Il avait une voix magnifique, une facilité naturelle extraordina
esse Amélie, pour une semblabl
ter étrangère à toute passion et à tout engagement de c?ur, me fit découvrir la trahison d'Anzoleto. Le lendemain soir, le comte Zustiniani me fit une déclaration d'amour, à laquelle j'étais loin de m'attendre, et qui m'offensa profondément. Anzoleto feignit d'être jaloux, de me croire corrompue... Il voulait briser avec moi. Je m'enfuis d
à qui le courage et la vertu de la Po
oupable, dans la vie des Zingari, qu'on appelle aussi Bohémiens, en fran?ais. Quant à moi, je partais, non pour cette Bohême symbolique à laquelle mon sort semblait me destiner comme tant d'autres, mais pour
da la princesse, qui écoutait avec beaucoup d'at
agne avec le respectable Christian de Rudolstadt, chef de la famille. La jeune baronne Amélie, nièce de ce dernier, demandait une gouvernante, c'est-à-dire une demoiselle de compagnie qui fit semblant de lui enseigner la musique, et qui l
Chateau des Géa
int amoureux de toi, co
e comte Albert, qui passait pour fou, et qui unissait à une ame sublime, à un génie entho
es facultés supernaturelles, le don des prophéties, la seconde vue, le pouvoir de se rendre invisible... Sa famill
i qu'un être malheureux, privé, par l'excès même de sa vertu, du flambeau de la raison; mais en aucun temps je ne l'ai vu semblable aux vulgaires humains. Dans le délire comme dans le calme, dans l'enthousiasme comme dans l'abattement, il était toujours le meilleur, le plus juste, le plus s
prends courage, et continue. Je t'écoute sans
la seule qui l'ait jamais entendu à Riesenburg; car sa famille n'a jamais su qu'il possédait cet incomparable talent. Son amour naquit donc d'un élan d'enthousiasme et de sympathie musicale. Sa cousine, la baronne Amélie, qui était fiancée avec lui depuis deux ans, et qu'il n'aimait pas, prit du dépit contre moi, quoiqu'elle ne l'aimat pas non plus. Elle me le témoigna avec plus de f
ut desquelles il reparaissait tout d'un coup, croyant ou feignant de croire qu'il n'avait pas quitté la m
rotte et plusieurs chambres mystérieuses, antique construction souterraine qui date du temps des Hussites. Albert, tout en parcourant une série d'opinions philosophiques très-hardies, et d'enthousiasme religieux portés jusqu'au mysticisme, était resté hussite, ou, pour mieux dire, tabor
ur) La Pierre
rait ces choses-là comme moi qui ai passé ma vie à les étudier dans les livres? Quand je te le disais, de Kleist, qu'il y avait parmi ces êtres que l'opinion de
séjour à Riesenburg. Mais là j'ai tant entendu parler de ces choses, et j'ai été forcée de tant réfl
aient enseignée sur les droits des peuples et le mérite des individus; mais je ne partage pas ton admiration pour le fanatisme taborite et pour leur délire d'égalité chrétienne. Ceci est absurde, irréalisable, et entra?ne à des excès féroces. Qu'on renverse les tr?nes, j'y consens, et... j'y travaillerais au b
es qu'elle a étudiées. Vous avez ici des historiens et des savants qui se sont occupés de ces graves matières, et vous pouvez juger, mieux que moi, de leur sagesse et de leu
vable et bien pardonnable), amoureux de toi, d'ailleurs, ce qui est plus naturel et plus légitime encore, n'admettait pas que tu ne fusses pas son égale devant Di
découvert, et dont l'entrée était une citerne située auprès de son appartement, dans un parterre de fleurs. Une fois arrivé à sa caverne, il oubliait les heures, les jours et les semaines. Soigné par Zdenko, ce paysan po?te6 et visionnaire, dont l'exaltation avait quelques rapports avec la sienne, il ne songeait plus à revoir la lumière et à retrouver ses parents que lorsque l'accès commen?ait à passer; et malheureusement ces accès devenaient chaque fois plus intenses et plus longs à dissiper. Une fois enfin, il resta si longtemps absent qu'on le crut mort, et que j'entrepris de dé
ginale de George Sand est conservé
tait le rendre à l
rvinsse à l'aimer, et à n'être jam
endais dans un puits, tu risquais
t m'engloutir. Albert, ne me reconnaissant pas d'abord, faillit me faire partager sa folie, car la frayeur et l'émotion rendent les hallucinations contagieuses... Enfi
?u à Maria del Consuelo,
tièrement. Son père me bénit et me traita comme une fille chérie. Une vieille tante bossue, la chanoinesse Wenceslawa, ange de tendresse et patricienne remplie de préjugés, se f?t résignée elle-même à m'accepter, Albert implorait mon amour. Le comte Christian en vint jusqu'à se faire l'avocat de son fils. J'étais émue, j'étais effrayée; j'aimais Albert comme on aime la vertu, la vérité, le beau idéal; mais j'avais encore peur de lui; je répugnais à devenir comtesse, à faire un mariage qui soulèverait contre lui et contre sa famille la noblesse du pays, et qui me ferait accuser de vues sordides et de basses intrigues. Et puis, faut-il l'avouer? c'est là mon seul crime peut-être!... je regrettais ma profession, ma liberté, mon vieux ma?tre, ma
enck, et je serais heureuse. Tu ne voulais pas devenir d'artiste, princesse pour épouser Rudolstad
ncre; ma conscience serait en repos. Mais c'est à résoudre ce probl
de prononcer sur les cas de conscience. Tu doutes que nous soyons libres d'aimer ou
du v?tre. Moi, née pour être reine aussi (sur les planches) je n'ai pas eu le courage et la générosité de sacrifier joyeusement le clinquant de cette gloire menteuse à la vie calme et à l'affection sublime qui s'offrait à moi. J'étais prête à le faire par dévouement, mais je ne le faisais pas sans douleur et sans effroi; et Albert, qui voyait mon anxiété, ne voulait pas accepter ma foi comme un sacrifice. Il me dem
aimais encore l'aut
ne voix dans le ravin; je reconnais un chant que j'ai étudié autrefois avec Anzoleto, je reconnais surtout cette voix pénétrante que j'ai
qu'allait-il f
ncienne camarade d'école, dont Zustiniani avait fait sa ma?tresse. En homme du monde, c'est-à-dire en libertin frivole, le comte s'était vengé en reprenant Corilla sans congédier l'autre. Au milieu de cette double intrigue, Anzoleto, persiflé par son rival, prit du dépit, passa à la colère, et, par une belle nuit d'été, donna un grand coup
cette grotte, les émotions les plus pénibles. Ce lieu lugubre, les ossements hussites dont Albert avait fait un autel au bord de la source mystérieuse, le son admirable et déchi
oir l'existence éternelle, la mémoire des siècles pas
ion à cet égard a fait sur moi une si vive impression, qu'a
sprit faible, malgré
tte que ma raison s'égarait. Ce qui m'épouvanta le plus, c'est que je n'y trouvai pas Zdenko comme je m'y attendais. Il y avait plusieurs mois que Zdenko ne paraissait plus. Comme il avait persisté dans sa fureur contre moi, Albert l'avait éloigné, chassé de sa présence, après quelque discussion violente, sans doute, car il paraissait en avoir des remords. Peut-
Zdenko te ha?ssa
stre prédiction s'est accomplie. Mon amour a tué Albert, et huit jours après je débutais ici dans un opéra bouffe des plus gais; j'y étais forc
ne plus savoir où j'en suis, et à perdre l'esprit en l'éc
dans leurs ames mystérieuses ne m'a jamais été expliqué, et il
dt n'avait pas tué son
e et coupable, je me persuadai que ce meurtre avait été consommé. Une tombe fra?chement remuée qui était dans la grotte, et qu'Albert m'avoua renfermer ce qu'il avait eu de plus cher au monde avant de me conna?tre, en même
as convenu le moins du monde. Le digne M. de Kleist croyait au diable, et lui faisait des sacrifices. C'est lui qui
e. Je crois que tu as divorcé un peu trop tard. M
suivait sans songer à se justifier de mes
zol
mon enfance, de mon pur amour, de mes beaux rêves, de mon bonheur passé. Je sentis que j'aimais encore... et que ce n'était pas celui que je devais, que je voulais, que j'avais promis d'aimer. Anzoleto me conjura tout bas de le recevoir la nuit dans ma chambre, et me mena?a d'y venir malgré moi à ses risques et périls, et aux miens surtout. Je n'avais jamais été que sa s?ur, aussi colorait-il son projet des plus belles intentions. Il se soumettait à mon arrêt, il partait à la pointe du jour; mais il voulait me dire adieu. Je pensai qu'il voulait faire du bruit dans le chateau, un esclandre; qu'il y aurait quelque scène terrible avec Albert, que je serais souillée par ce scandale. Je pris une résolution, désespérée, et je l'exécutai. Je fis à minuit un petit paquet des hardes les plus nécessaires, j'écrivis un billet pour Albert, je pris le peu d'argent que je possédais (et, par parenthèse, j'en oubliai la moitié); je sortis de ma chamb
is-tu à Vienne pl
moi, et s'était imaginé de venir me trouver pour me demander ma protection auprès du Porpora. Nous rev?nmes ensemble à Vienne, à pied, souvent bien fatigués, toujours gais, toujours amis et frères. Je m'attachai d'autant plus à lui qu'il ne songea pas à me faire la cour, et que je n'eus pas moi-même la pensée qu'il put y songer. Je me déguisai en gar?on, et j