Confession de Minuit / Roman
er des balivernes et je pe
entais le temps se dérober sous moi et je n'en demandais pas davantage. Vivre vraiment? Je remettais la vie à
gement de la saison; la fra?che
lloir mettre tes
omme autant d'habitudes bien à moi, comme des manifestations de ma pauvreté Intérieure. Grace à ce pantalon cagneux et couronné, grace à cette veste terne et bossue, je me sentais assuré de passer inaper?u, ce qui est un si grand bien dans l'existence. Mère me fit donc endosser mon vêtement d'hiver, cette jaquette assez chaude, presque noire, que vous me voyez aujou
mander d'argent à ma mère. La pauvre femme ne me parlait jamais de ces choses. Parfois j'allais, pour elle, faire quelque achat et je ne lui rendais pas la monnaie. C'était une fa?on assez disc
iotte, une jaquette d'employé aisé ou de bourgeois. Cet habit, en désaccord avec l'état de mon gousset, me devint comme un mensonge intolérable. C'est c
ient?t fiévreuse sans c
ne situation avantageuse et s?re disent volontiers: ?Un gar?on vraiment courageux, vraiment résolu fin
une place!? j'eus l'impression obscure mais tenace que je ne trouverais absolument plus rien. Et,
et que ce mur-là, c'est l'avenir, et qu'on ne peut ni l'escalader, ni le renverser, ni le perce
e la personne attendue ne viendrait s?rement plus et de continuer à espérer quand même. Il vous est arrivé de conna?tre de telles angoisses et, aussi, celle que l'on éprouve à s'en aller
la pluie, au coin d'une rue. Je savais que tout espoir était inutile et je faisai
mes courses, pendant tous ces moments de solitude ambulan
ment. Eh bien, non! En réalité, ce qu'il y avait de frappant c'était bien plut?t la passivité avec laquelle je pensais. J'étais visité, traversé, brutalisé, violé par maintes pensées que je subissais sans les provoquer en quoi que ce f?t. Puis-je dire que je pensais? Puis-je m'attribuer ce mérite? N'
tiennent leur propos; il y a des gens capables de diriger leur esprit comme un navire sur une mer semée
un courant tumultueux; je le contiens, c'est tout. Et encore, voyez le
pendant que j'errais à la recherche de cette introuvable situ
vous relater, qu'il me faut bien vous relater, mai
ou huit heures. Il tombait une de ces pluies dont on ne devrait pas dire qu'elles
fond de Grenelle et je suivais la rue de Vaugirard. Je récapitulais ma journée: elle ne me montrait qu'un visage morne et revêche. Je n'avais pas, en
exactement l'endroit--une pensée me traversa l'esprit. Voici: j'allais, e
n'a que soixante ans; je ne lui connais nulle infirmité, elle jouit d'une santé excellente et régulière. Je ne pense donc jamai
avait pas la nature inquiétante d'un pressentiment. Non! rien qu'une combinaison des idées. Je fis effort, vous dis-je, mais je m'aper?us bient?t que cette pensée n'était pas venue seule: cependa
voyais l'enterrement, le corbillard dans les petites rues, le cimetière,
ait celle-ci: il y a la petite rente. Je vous en ai déjà parlé, de cette petite rente: deux cent quarante francs par trimestre; un titre dont j
ibre et misérable: du pain, des pommes de terre. Je m'incrustais dans une solitude farouche. Je ne devais plus rien au reste du monde.
de pluie à l'extérieur et de sueur à l'intérieur. Un grand tremblement s'emparait de moi. Je regardais avec horreur, à la lueur d'un réverbère,
calmement et, tout de suite, j'organisais ma vie sans ma mère. Je supprimais m
les mépriser et les chasser. Une autre voix, sifflante, exaspérante, répétait obstinément: lache, lache. Mais, nette, en dépit de ce tumulte, une troisième voix comptait avec placidité:
ruisselantes d'eau. Je ne pense pas que c'étaient des larmes: il
mon ame presque immobile, comme un cheval rétif que l'on mate en tirant très fort sur les rênes. Je pensai, lentement, en remuant les lèvres, je pensai mot à mot: ?Si ma mère venait à mourir...? Aussit?t, je sentis ma gorge se serrer de chagrin et une vive détresse, que je connaissais bien pour l'avoir éprouvée déjà, me saisit au ve
s secondes, que j'avais repris le pou
d'un chapeau melon déformé par la pluie, s'approchait doucement, en marchant de c?té, ses reins frottant le petit
avan?ait en rampant. A deux pas de moi, il s'arrêta, comme s'il m'e?t senti, comme s'il e?t per?u le bruit de ma vie. Je le regardai et murmurai: ?Celui-là, celui-là!
is que l'aveugle avait recommencé à ramper contre la g
e pensée. En pénétrant dans la rue d'Ulm, je me surpris à compter: ?Quinze sous pour le repas du midi, dix
ite à la maison. Cela vous prouve que je n'avais, en réalité, aucune inquiétude: je savais bien, je sent
nsai avec méthode et ténacité: ?En vendant presque tous
Je n'étais pas le ma?tre de mes pensées. Inutile de résister. Inutile surtout de me dissimuler c
maison, bien persuadé que j'aimais toujours tendrement ma mère, mais que j'étais absolument incapab